Après la séance du 16 mars, une réunion plutôt « technique » sur des codes CCAM mais qui a permis aux syndicats de réagir après les propositions chiffrées de la CNAM du 16 février (lire id n° 8), les positions des syndicats s’avèrent assez divergentes.
La FSDL estime qu’aucune avancée notable n’a eu lieu, mais continue de militer pour un objectif « zéro carie » et souhaite donc une large valorisation de la prévention. « La priorité reste la valorisation des soins conservateurs à un niveau décent et une dentisterie qui respecte le gradient thérapeutique, tout en s’inspirant des modèles scandinaves et allemands pour la prévention, souligne le syndicat sur son site Internet. Nous avons demandé la suppression du panier RAC maîtrisé car il n’est pas l’objet d’une promesse électorale démagogique comme le panier RAC zéro auquel nous restons opposés si aucun objectif de santé n’y est accolé. » La FSDL demande également la levée de l’opposabilité sur les actes d’endodontie et les extractions. « Nous continuerons à nous battre et à répéter sans cesse nos propositions jusqu’à obtenir le maximum de mesures permettant un changement de système, c’est pour cela que la profession nous a donné mandat lors des dernières élections URPS », martèle-t-elle.
Pour l’Union Dentaire et la CNSD, le compte n’y est toujours pas. « Cette séance a été l’occasion d’entrer dans le vif du sujet, estime la CNSD. Il a enfin été possible de prendre le temps de débattre et d’identifier les contraintes de chacun. » Le syndicat s’oppose principalement à la proposition de répartition en volume entre les actes plafonnés (87 %) et libres (13 %). « Soit le financement augmente, soit les plafonds sont réévalués, soit des actes plafonnés doivent revenir dans le panier libre, ces trois options pouvant être combinées », jauge le syndicat qui a également insisté sur l’indexation des plafonds sur « les prix à la consommation » et la mise en place de clauses de sauvegarde qui « ne devront pas bénéficier aux seuls financeurs, mais aussi servir à sécuriser les chirurgiens-dentistes et les prémunir des conséquences d’une augmentation de volume liée à l’amélioration de l’accès aux soins ». L’Union Dentaire, de son côté, constate « une forme d’enlisement de cette négociation, notamment avec l’apparition du RAC 0 voulu par le gouvernement qui nous amène à n’avoir aucune lisibilité sur l’équilibre global des propositions faites ». Pour le syndicat, « le gain réel pour notre profession est actuellement trop faible et l’équilibre entre les revalorisations et les plafonnements n’est pas assuré ». Mais l’UD espère que la suite des débats « permettra de supprimer les blocages persistants et d’obtenir un texte permettant à l’ensemble de la profession de s’y retrouver » pour éviter « à tout prix » le règlement arbitral.
« Tout ce qui préserve la dent est plafonné »
Peu avant cette séance de négociations, 235 universitaires (doyens, chefs de service, professeurs, maîtres de conférences, assistants, anciens assistants chargés d’enseignement…) ont signé puis envoyé le 12 mars une lettre au directeur de la CNAM, Nicolas Revel, et à Agnès Buzyn, ministre de la Santé, pour faire part et de leurs craintes et inquiétudes après les propositions chiffrées de la CNAM. Selon eux, celles-ci favorisent les pratiques les moins conservatrices, à savoir les couronnes. « Tout ce qui préserve la dent est plafonné (restauration partielle indirecte comme les inlays/onlays/overlays) ou non remboursé (parodontie, prévention…), dénoncent-ils. Les praticiens seront donc incités à couronner les dents ou à les extraire plutôt que de les pérenniser ! » Les propositions de la CNAM seraient incohérentes.
Alors que le directeur de la CNAM a dit publiquement vouloir « améliorer la prévention et le recours à des soins conservateurs plus respectueux des dents et des tissus dentaires, en favorisant la qualité des pratiques », il n’en donnerait pas les moyens aux chirurgiens-dentistes. « Les objectifs de la dentisterie moderne que nous enseignons se fondent sur la préservation tissulaire maximale de l’organe dentaire. Comment pouvons-nous continuer à enseigner aux étudiants de réaliser des inlays/onlays/overlays dans une enveloppe budgétaire restreinte ?, s’interrogent-ils. Les personnes qui vous ont conseillé pour définir ces honoraires n’ont peut-être pas apprécié de façon juste les frais en relation avec ces techniques. Ainsi, ce plafonnement à un prix inadapté est très risqué car cela empêchera les praticiens qui savent les faire d’en réaliser. » Ces dernières années, « alors que les protocoles de collage étaient déjà bien codifiés », certains chirurgiens-dentistes ont dû réaliser des couronnes « alors qu’elles auraient pu être évitées, se laissant guider dans leur traitement par le seul souhait de remboursement des patients.
Les dégâts qui en résultent sont considérables, et ont entraîné des coûts très importants supportés par les Français, par la Sécurité sociale et les mutuelles », rappellent-ils. Sans une valorisation à la hauteur des moyens mis en œuvre par les techniques actuelles, « l’offre de soins en France va limiter les options thérapeutiques aux techniques les plus mutilantes pour les dents ». Les universitaires se disent « déterminés à ne pas laisser faire les choses en état, car ce serait la négation de notre engagement pour la santé bucco-dentaire de nos concitoyens et la négation de ce que nous enseignons au quotidien à nos étudiants » et se proposent de participer à l’élaboration « d’un projet ambitieux pour la santé bucco-dentaire des Français associé à un enseignement universitaire de haut niveau ». Une lettre restée jusque-là (21 mars) sans réponse.
Les prochaines séances de négociations se tiendront les 5 et 6 avril.
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